Imoca MACSF • Vendée Globe 2024
Isabelle Joschke : "J’espère bien reprendre des forces d’ici l’entrée dans le Pacifique"
mardi 17 décembre 2024 –
Il aura fallu batailler ferme pour en arriver là et valider le deuxième des trois caps obligatoires de ce Vendée Globe 2024. Après Bonne Espérance, il y a un peu plus de douze jours, Isabelle Joschke vient de franchir la longitude du Cap Leeuwin située à l’Ouest de l’île-continent, l’Australie. Avec ses deux compagnons de route, Jean Le Cam et Alan Roura, Isabelle fait toujours route plein Est vers la Tasmanie, terme d’un Océan Indien rebelle et difficile qui n’a pas épargné la navigatrice.
Isabelle Joschke a coupé la longitude du Cap Leeuwin en Australie à 7h 15 minutes et 32 secondes (heure française), ce 17 décembre 2024 sur MACSF. Elle aura mis 12 jours, 7 heures, 27 minutes et 18 secondes pour relier le Cap de Bonne Espérance à ce deuxième point de passage du Vendée Globe. En ce 17 décembre, Isabelle est actuellement en 17e position.
Le Cap de la délivrance
« Cet océan est d’un engagement physique et mental incroyable.Je viens de passer le Cap Leeuwin et c’est une véritable délivrance ! Depuis Bonne Espérance j’ai navigué de tempêtes en coups de vent, dans une mer épouvantable. Ça s’est enfin calmé. Depuis hier, j’ai l’impression de revivre et je mesure toute la fatigue accumulée ces derniers jours ».
Depuis le passage de Bonne Espérance et l’entrée dans l’Océan Indien, les éléments se sont liés pour offrir aux skippers un tableau peu enchanteur fait de dépressions, d’une mer casse-bateau et énorme.
« Après ma descente de l’Atlantique qui a été parfaite, l’entrée dans l’Océan Indien a été brutale. Je n’ai eu que très peu de temps pour m’y acclimater. La transition a été assez violente. Depuis Bonne Espérance, nous ne sommes pas épargnés et si le vent est assez violent, la mer l’est tout autant. Elle est forte et désordonnée. Ça fait presque 15 jours que je suis dans l’Indien et ça commence à tirer sur la corde. J’étais un peu en mode chien fou au début mais je me suis bien calmée. Il y a de temps en temps des actions qui me rappellent à l’ordre », complète Isabelle.
Deux hommes et une femme
Accompagnée depuis Bonne Espérance par deux marins concurrents, Isabelle ne cache pas sa joie de pouvoir se jauger, de pouvoir échanger et de se lancer dans une course dans la course, même si son leitmotiv reste de faire sa course et de ne pas se calquer sur celle des autres. Jean Le Cam et Alan Roura sont donc les compagnons de route d’Isabelle Joschke et, au fil des croisements, les marins échangent et retrouvent un peu de compagnie dans cet univers liquide pas si sympathique.
« J’ai beaucoup aimé ma course entre les deux groupes dans l’Atlantique mais je dois avouer qu’avoir Jean et Alan à mes côtés est plutôt agréable. Il y a une certaine émulation justement. Je n’ai pas eu le choix, ils sont bien revenus. Ce qui est chouette c’est de pouvoir échanger et discuter un peu. Je me rends compte que nous avons les mêmes galères et que nous souffrons de la même façon. C’est quelque part assez réconfortant ».
La course dans la course
Au coude à coude depuis presque 15 jours, les trois marins disposent de bateaux radicalement opposés. Un nouveau monocoque à dérive pour Jean Le Cam, un foiler redessiné et très puissant pour Alan Roura et MACSF, un IMOCA de 2007 à foils pour Isabelle. Il est captivant de découvrir que les trois bateaux naviguent quasiment à la même vitesse depuis l’entré dans l’Indien.
« Les trois bateaux sont tous très différents et c’est très intéressant de découvrir que nous nous tenons depuis tout ce temps. Jean va super vite au portant. Son bateau est incroyable dans ces mers du sud mais il n’y a pas que cela qui compte. Il y a beaucoup de paramètres qui entrent en compte comme le positionnement par rapport aux systèmes météo. De mon côté, je suis pleinement entrée dans ce rythme qui tient compte de l’ensemble de la course. Cette navigation dans l’Indien nécessite un gros engagement. Il y a beaucoup de manœuvres et je suis secouée continuellement ».
La bonne alchimie voile-vent
Privée de son petit gennaker depuis le début de la course, Isabelle parvient, grâce aux systèmes dans lesquels elle évolue depuis les quarantièmes rugissants, à conserver le bon ratio vent-voile. Pour le moment, cette voile manquante n’est pas un handicap.
« J’ai actuellement la bonne météo pour l’utilisation du jeu de voile qu’il me reste. Je ne sais pas si cela va durer mais ça fonctionne plutôt pas mal. »
Un mot d’ordre : récupération
Après les dépressions infernales, la navigation sous le continent australien devrait laisser à Isabelle de belles phases de repos. Une nécessité car faire évoluer un IMOCA dans des conditions si difficiles demande une énergie, un savoir-faire ainsi qu’une maîtrise sans faille. Il est évident que ces longues journées dans cet enfer liquide laissent des traces ; à Isabelle désormais de les estomper pour reprendre sereinement de la vigueur pour le prochain grand événement : l’entrée dans le Pacifique, 1300 milles devant son étrave.
« Cette nuit j’ai beaucoup dormi pendant que MACSF cravachait pour rester au maximum à l’avant du flux de Nord-Ouest. J’espère bien reprendre des forces d’ici l’entrée dans le Pacifique, dans quelques jours, car la route est encore longue ! » conclut Isabelle.