Sodebo Ultim 3 | Trophée Jules Verne
L’équipage de Thomas Coville : Fédéric Denis, Pierre Leboucher, Léonard Legrand, Guillaume Pirouelle, Benjamin Schwartz et Nicolas Troussel
mardi 5 novembre 2024 –
Dans les prochains jours, l’équipage de Sodebo Ultim 3 emmené par Thomas Coville débutera son stand-by, pour s’attaquer au Trophée Jules Verne, le record du tour du monde en équipage, détenu depuis janvier 2017 par Idec Sport (Francis Joyon) en 40 jours 23 heures 30 minutes et 30 secondes.
C’est l’un des records les plus convoités de la planète voile, déjà tenté par Sodebo fin 2020. Si l’aventure s’était arrêtée après 16 jours alors que le trimaran était dans les temps du record, le skipper et son fidèle partenaire depuis 25 ans ont toujours gardé cet objectif en tête, conscients qu’il faut savoir persévérer quand cela ne se concrétise pas dès la première tentative. Thomas Coville est un insatiable. Moins d’un an après sa deuxième place sur l’Arkea Ultim Challenge-Brest (course autour du monde en solitaire), le voilà prêt à enchaîner pour un deuxième tour, le dixième de sa carrière.
Pour relever ce sacré défi, le skipper de Sodebo Ultim 3 a choisi de s’entourer de Frédéric Denis, Léonard Legrand, Pierre Leboucher, Guillaume Pirouelle, Benjamin Schwartz et Nicolas Troussel. Afin de préparer cette échéance, l’équipage a beaucoup navigué depuis la remise à l’eau de Sodebo Ultim 3 mi-juin, entre entraînements au large de Lorient et participation aux deux courses du calendrier de la classe Ultim, les 24h Ultim (2e place) et la Finistère Atlantique (3e).
Présentation des sept candidats qui vont s’engager dans cette course contre le chrono, doublée d’une véritable aventure humaine.
Thomas Coville, 56 ans
On ne présente plus le skipper de Sodebo Ultim 3, l’un des marins français les plus expérimentés autour du monde. Entre son premier tour, en 1997 sur le Trophée Jules Verne aux côtés d’Olivier de Kersauson, et son dernier, l’Arkea Ultim Challenge-Brest en solitaire en début d’année 2024 (deuxième place), Thomas Coville aura bouclé neuf fois le tour de la planète à la voile, 5 en solitaire, 4 en équipage, 7 en multicoque, 2 en monocoque. Avec réussite, puisqu’il a détenu le Trophée Jules Verne à deux reprises (1997 et 2010 avec Franck Cammas sur Groupama 3) et le record en solitaire en 2016 (49 jours, 3 heures et 7 minutes, battu l’année suivante par François Gabart). « Thomas a une énorme expérience, c’est à la fois rassurant et un privilège de partager cette aventure avec lui, mais également un gage de performance, car il connaît les spécificités de chaque endroit », résume Frédéric Denis. Pour s’attaquer de nouveau au Trophée Jules Verne, « un défi unique et singulier », Thomas Coville, animé de « l’envie de se nourrir des autres », a choisi de s’entourer de six équipiers qui, eux, n’ont jamais fait le tour de la planète. « Tous ensemble, on rêve d’être Duplantis (Armand Duplantis, champion olympique et recordman du monde de saut à la perche) et de passer sous la barre des 40 jours. On a l’enthousiasme et l’émerveillement d’aller voler sur un bateau de cette dimension dans des endroits hostiles. Ce sont des moments dans lesquels les athlètes se subliment, on a envie de s’offrir cette transcendance commune et collective. »
Frédéric Denis, 40 ans
Né à Pithiviers (Loiret), Frédéric Denis a longtemps vécu dans la région nantaise, initié à la voile à Pornichet où il passait ses vacances et week-ends, « plutôt sur l’eau que sur la plage ». De la voile légère d’abord, du J80, du match-racing et le Tour Voile ensuite, avant de se lancer au large : « La course au large me faisait de l’œil, j’ai décidé de passer ma Mini d’abord, comme le dit le dicton ». Avec succès, puisque dès sa première année, « Freddy » remporte la Mini Transat 2015 en proto, preuve d’un talent certain. Entre-temps, il avait découvert le Team Sodebo qui l’avait accueilli pour son stage de fin d’études en électronique en 2010.
Il y a deux ans, il revient dans l’équipe, après avoir notamment goûté à l’Imoca auprès d’Alan Roura (9e de la Transat Jacques Vabre 2017) et au Class40 avec Axel Tréhin (victoire sur la Normandy Channel Race en 2021). « Touche à tout » à bord de Sodebo Ultim 3, Frédéric s’attaque à son premier tour du monde, estimant que le Trophée Jules Verne, « c’est un peu un graal, un rêve qui s’accomplit », avant d’ajouter, à propos de la difficulté de l’exercice : « Il faut vraiment trouver le curseur entre aller le plus vite possible et garder le maximum du potentiel du bateau jusqu’au bout. » Et ce père de trois enfants de conclure : « J’attends particulièrement les grandes mers du Sud qu’aucune barrière ne freine, je suis à la fois impatient mais aussi un peu effrayé à l’idée de les rencontrer. »
Pierre Leboucher, 43 ans
Pierre Leboucher est un sportif dans l’âme, qui a commencé la voile en Optimist sur l’Erdre, à côté de Nantes, avant de suivre la filière classique du dériveur qui l’a mené jusqu’au 470. Il est deux fois vice-champion du monde et finalistes aux Jeux Olympiques de Londres en 2012 (7e). « Je me suis alors dit qu’il y avait plein d’autres choses à faire et je me suis mis à la course au large. » Particulièrement au Figaro, dont il est devenu un pilier du circuit, remportant notamment la Sardinha Cup en 2022 et une étape de la Solitaire du Figaro. La porte de Sodebo Ultim 3 s’est ouverte cette année : « Je me suis senti mûr pour postuler », sourit celui qui se réjouit d’avoir « la chance de partir sur un premier tour du monde qui va me permettre de découvrir de nouveaux océans et décors, c’est palpitant ».
Barreur/régleur, mais également en charge de la mécanique, du gréement et des voiles, l’ancien « olympien » mesure cependant la difficulté de la tâche, celle de se battre contre un chrono et non contre des adversaires : « On sait très bien qu’avant d’envisager le record, il faut arriver au bout, donc préserver le matériel. L’exercice consiste à ne pas l’utiliser à 300%, mais pas à 80% non plus, sinon tu risques de ne pas battre le record. Et sans concurrent à côté, c’est sans doute plus difficile de trouver la bonne cadence. » Le Nantais rappelle que la dimension humaine est un élément clé de la réussite : « Quand je regarde les hommes à bord et notre préparation, qui a permis de souder l’équipage, ça matche bien entre nous, je suis confiant. »
Léonard Legrand, 30 ans
Arrivé au sein du Team Sodebo en 2015 dans le cadre d’une alternance en électronique, Léonard Legrand n’en est depuis plus parti. En moins de dix ans, celui qui a commencé sur une planche à voile du côté de Saint-Cast est en effet parvenu à y faire sa place, occupant désormais la responsabilité du pôle électronique et informatique. Au-delà de cette expertise technique, son grand sourire et sa forte volonté lui ont permis, peu à peu, de sortir du cadre pour devenir un navigant à part entière. « En électronique, une partie du travail se fait en mer, puisqu’on doit calibrer les capteurs automatiques, valider les pilotes, voir comment Thomas utilise le bateau pour mettre les outils à sa main, ça nécessite donc de naviguer.
Au début, je n’y connaissais rien, mais petit à petit, j’ai pris mes marques jusqu’à être utile à bord. » Son envie d’apprendre et de progresser l’a aussi amené depuis deux ans à naviguer à bord du trimaran Viabilis sur le circuit des Ocean Fifty. Séduit par l’enthousiasme de « Léo » - « on l’appelle Léonard quand on a quelque chose à lui reprocher », sourit Thomas Coville qui a été vite convaincu de l’embarquer pour cette tentative de Trophée Jules Verne. « Notre équipe et nos compétences se complètent. On a réussi à avoir le bon mélange à bord entre les techniciens/navigants membres du Team Sodebo, qui connaissent par coeur le bateau, et les marins qui viennent de l’extérieur et apportent leur expérience de la compétition, la précision des réglages. Ce mariage se fait très bien », souligne Léonard qui, en plus de barrer et régler le bateau comme les autres, gérera la partie électronique et aura la casquette de media man. Pour l’un des benjamins de l’équipage, « le Trophée Jules Verne, c’est ce qu’on peut imaginer de mieux en voile, c’est très fort sportivement, mais aussi humainement, il faut réussir à vivre à sept pendant 40 jours dans un espace de 6m2. Ça peut faire peur, parce que ce n’est pas sans danger, mais c’est en même temps hyper grisant. »
Guillaume Pirouelle, 30 ans
Originaire de Normandie, Guillaume Pirouelle est un talent précoce qui, comme beaucoup, a fait ses armes en voile légère avec déjà de beaux titres : double champion d’Europe et double vice-champion du monde en 420. Il confirme en 470 (champion du monde jeune en 2015, vice-champion d’Europe en 2017), ce qui lui vaut d’être embarqué au sein du Team Beijaflore sur le Tour Voile, qu’il remporte en 2019. « Curieux de nature », il décide alors de se lancer en course au large, avec bonheur puisqu’il est sélectionné par la région Normandie pour succéder à Alexis Loison sur le circuit Figaro. Le Havrais frappe fort d’entrée, terminant deuxième (et premier bizuth) de sa première Solitaire du Figaro, en 2022.
Des résultats qui lui valent d’être invité à faire un essai la même année sur Sodebo Ultim 3. « C’était inattendu parce que cela ne faisait que deux ans que je faisais de la course au large, mais je ne pouvais pas refuser. C’est un rêve de naviguer en Ultim et l’opportunité d’apprendre énormément de choses sur des machines ultra technologiques », commente celui qui est par ailleurs titulaire d’un diplôme d’ingénieur à l’INSA Rennes. Barreur/régleur à bord, également en charge de l’accastillage, de l’hydraulique et de l’avitaillement, Guillaume – le plus jeune de l’équipage - considère que « le Trophée Jules Verne est un défi hors norme. Pour moi, c’est le record ultime, très dur à battre, il faut réussir à tenir dans la durée, tant physiquement que mentalement. Ça fait un peu peur, mais on est chacun bien préparés, j’espère découvrir plein de choses et revenir avec des étoiles plein les yeux. »
Benjamin Schwartz, 37 ans
Dernier arrivé dans l’équipage, Benjamin Schwartz peut se targuer d’une solide expérience du large. Ce Lyonnais d’origine, qui s’est initié à la voile sur les lacs de sa région et en Méditerranée, a décidé d’en faire son métier à la fin de ses études en géologie appliquée, après de premières expériences notamment auprès de Lionel Péan et de François Duguet (aujourd’hui boat captain de Sodebo Ultim 3). Il intègre ensuite en tant qu’électronicien l’équipe technique de Dongfeng Race Team de Charles Caudrelier, vainqueur de la Volvo Ocean Race 2017-2018.
Ce dernier lui suggère alors de se former sur le circuit Figaro, un conseil avisé, puisque Benjamin termine premier bizuth (et 6e au général) de la Solitaire du Figaro 2019, décrochant la même année le titre de champion de France Elite de course au large. Son talent, particulièrement de navigateur, en fait dès lors un équipier très recherché. Il découvre ainsi l’Imoca sur The Ocean Race Europe en 2021 auprès de Nicolas Troussel … qu’il retrouve donc à bord de Sodebo Ultim 3, avant d’être le skipper de Holcim PRB sur les dernières étapes de The Ocean Race 2023. Membre de l’équipage de Yann Guichard en 2018, l’exercice du stand-by et du Jules Verne, il connaît. « J’étais embarqué sur la tentative l’hiver 2018 - 2019 que l’on avait bien commencé mais malheureusement avortée en Australie sur casse d’une mèche de safran. Ensuite nous avons fait un an de stand-by, sans jamais partir. » Et puis récemment, on le retrouvait dans l’équipe de Charles Caudrelier. Ce dernier ayant renoncé à s’élancer en fin d’année sur le Jules Verne (démâtage), Thomas Coville a proposé à Benjamin Schwartz de relever le défi sur Sodebo Ultim 3. « Benjamin a montré ces dernières années que le Trophée Jules Verne était l’un de ses objectifs majeurs. Il a beaucoup travaillé sur ce sujet : la gestion du stand-by, le parcours, la météo. Il s’est préparé pour cet exercice complexe. Il va renforcer notre organisation du bord entre Nico et moi sur la partie navigation. C’était naturel de l’intégrer et cela me plaît de partir à 7. »
Nicolas Troussel, 50 ans
Originaire de la baie de Morlaix, Nicolas Troussel est, après Thomas Coville, le plus expérimenté de l’équipage de Sodebo Ultim 3, lui qui confie avoir « toujours voulu être professionnel dans le milieu de la voile ». Ce qu’il réussit à faire au début des années 2000 sur le circuit Figaro, qu’il marque de son empreinte en remportant la Transat AG2R en 2004 avec son copain de la baie, Armel Le Cléac’h, puis à deux reprises la Solitaire du Figaro, en 2006 et 2008. Suivent des expériences en Class40 (deuxième de la Route du Rhum 2010), sur le Tour Voile puis en Imoca, skipper de Corum L’Épargne. Si l’arrêt du projet en septembre 2023 est un coup dur pour « Nico », il ne reste pas inactif longtemps.
Thomas Coville, qui avait déjà fait appel à lui en 2022 pour toutes les courses en équipage, lui propose en effet de faire partie de l’aventure du Jules Verne. « Comme il a été lui-même skipper d’un projet, Nico a la faculté de se mettre dans ma tête en prenant le lead à certains moments, j’ai tout de suite vu qu’il avait compris ce que j’attendais de lui », commente Thomas Coville. Chargé de la navigation en relation avec la cellule de routage à terre, le Finistérien ne cache pas sa motivation au moment de s’attaquer à son premier tour du monde en équipage. « Le Jules Verne, c’est le plus beau record à décrocher en tant que marin, on sait tous très bien qu’il est très dur à battre, mais ça le valorise d’autant plus et ça donne encore plus envie. »
Sur le banc des remplaçants
- Basile Bourgnon, 22 ans, sort de trois saisons réussies sur le circuit Figaro, avec notamment une 2e place sur la Solitaire en 2023. Le fils de Laurent, qui a également couru en Class40 et sera en 2025 à la barre d’un Ocean Fifty, a navigué plusieurs fois sur Sodebo Ultim 3 cette saison, notamment lors du convoyage entre Antibes et Lorient.
- François Duguet, 43 ans, est, avec Thomas Coville, celui qui connaît le mieux Sodebo Ultim 3 dont il est le boat captain. Il faisait également partie de l’équipage de la précédente tentative sur le Trophée Jules Verne, en 2020.