Imoca • Tour du monde en solitaire
Vendée Globe 2024 : la flotte bute toujours sur une zone de vent faible
samedi 16 novembre 2024 –
La situation est toujours aussi floue pour la flotte qui bute toujours sur une zone de vent faible. Les partisans de l’Est sont pour l’instant à la fête à l’image de Jean Le Cam (Tout Commence en Finistère – Armor-lux) qui conserve sa position de leader acquise ce matin. Les tenants de l’option plus Ouest, menés par Thomas Ruyant (VULNERABLE), semblent toucher un peu plus de vent et pourraient s’offrir un avantage assez net. Sauf que la situation est loin d’être figée, ce qui renforce le suspense et ajoute une sacrée dose de stress pour les skippers.
Six jours de course, 1 600 milles parcourus (2960 km) et plus du tiers de la flotte qui se tient dans un rayon de 150 milles ! Il faut parfois se frotter les yeux, à regarder la cartographie et à s’habituer à ce scénario si atypique. Et ce que les météorologues et les spécialistes essaient de décrypter depuis la terre s’apparente, en mer, à une guerre des nerfs permanente ou à une étape de la Solitaire du Figaro dont l’arrivée a lieu dans plus de deux mois. Les raisons de cette situation ? Encore et encore ces grandes zones de molle (vent faible) qui barrent la route de la tête de flotte, ce qui a engendré un regroupement général depuis hier. Désormais, tous tentent de trouver la meilleure façon de s’en sortir et de s’échapper vers le Sud, sans avoir aucune certitude.
Trois options et beaucoup d’incertitudes
« Ça fait six jours qu’on est en course, c’est une régate planétaire et nous sommes tous à égalité, savoure Sébastien Simon (Groupe Dubreuil) aux vacations. On vit presque un nouveau départ ». « Les vitesses vont faire du yo-yo, poursuit Christian Dumard, consultant météo du Vendée Globe. Ils avancent, butent dans la molle, avancent à nouveau, butent encore… Il va y avoir beaucoup de changements de rythmes, des manœuvres, la journée sera stressante à coup sûr ». Louis Burton (Bureau Vallée) ne dit pas autre chose : « c’est le ciel qui décide de notre sort, il faut profiter de chaque risée ».
Pour bien comprendre la situation, il convient de diviser la tête de flotte en trois groupes : les audacieux de l’Est, les fonceurs de l’Ouest et les partisans du milieu. Les audacieux de l’Est, ce sont Jean Le Cam (Tout commence en Finistère – Armor-lux) suivi par Conrad Colman (MS Amlin). Cette stratégie audacieuse a permis au Roi Jean de prendre les commandes de la course la nuit dernière. « Qui ne tente rien n’a rien » disait-il hier. Au fil de la journée, Jean semblait bénéficier de conditions plus légères, ce qui l’a obligé à refaire une route plus Ouest. « Bien sûr qu’on regarde l’option de Jean, ça va être intéressant de voir s’il s’en sort », confiait ce matin Giancarlo Pedote (Prysmian).
Le skipper, qui fait partie des “partisans du milieu”, était leader hier soir, une grande première pour un skipper italien au Vendée Globe « J’ai eu la chance d’avoir un couloir de vent au centre qui m’a permis de revenir sur les autres, sourit le skipper italien. Après, rien n’est joué, on ne sait pas encore si l’option Ouest va s’avérer plus payante ». À ses trousses, Sébastien Simon (Groupe Dubreuil) veut croire à la pertinence de cette route. Lui qui explique être « arrivé là où le vent m’a mené » assure « que ça devrait passer entre ma position et l’Ouest de la flotte ».
D’où une question qui revient avec insistance : et si l’herbe était plus verte à l’Ouest ? Thomas Ruyant (VULNERABLE), le plus à l’Ouest de la flotte, accélère progressivement au fil de la journée : il est passé de 11 à 16 nœuds de moyenne. Certes, le Nordiste est actuellement 30e mais son choix pourrait s’avérer payant. Derrière lui, ils sont nombreux à tabler sur la même option. C’est le cas pour Charlie Dalin (MACIF Santé Prévoyance), Yoann Richomme (PAPREC ARKÉA) ou encore Jérémie Beyou (Charal) qui pointent à 30 milles de Thomas Ruyant. Parmi eux, il y a aussi Louis Burton (Bureau Vallée) : « là c’est à nouveau une sacrée régate ! » La crainte pour tous : que ceux qui arrivent à passer cette zone de molle puissent creuser un premier écart avec le reste de la flotte et prendre ainsi l’avantage.
Quoi qu’il en soit, le ralentissement général profite à Jingkun Xu (Singchain Team Haikou, 38e). Fortement distancé ces derniers jours, le skipper chinois a repris près de 200 milles à la tête de flotte. Il bénéficie de bonnes conditions (15 nœuds de vent, moins de 2 mètres de houle) et pointe à 260 milles des leaders. Plus loin, Szabolcs Weöres (New Europe, 39e), sort progressivement de la forte dépression. Maxime Sorel, de son côté, a pris le temps de se confier au lendemain de son abandon. Il a expliqué souffrir d’une « rupture partielle du ligament externe » et devrait rentrer en France dès demain. Surtout, le Cancalais donne rendez-vous pour la prochaine édition : « j’ai une envie féroce de revenir encore plus fort, de finir et de bien finir le Vendée Globe 2028 ».
Dans le reste de la flotte, si ralenti dans ces zones de molle, l’humeur est parfois légère. Les marins font tout pour garder le sourire… Ou le provoquer. C’est le cas chez Giancarlo Pedote, en pleine interview : « si j’ai l’air reposé, c’est parce que je mets un masque à chaque vacation. Je ne peux pas en dire plus, il est préparé par les services secrets italiens ». Romain Attanasio aussi a faire rire son monde dans une vidéo. Côte à côte avec Violette Dorange, il explique : « attend moi Violette ! Regarde j’ai deux brosses à dents… Une violette et une orange » Louis Burton s’amuse lui aussi alors qu’il est bord à bord avec Jérémie Beyou (Charal) : « je vais peut-être m’acheter une côte de bœuf ». Sébastien Simon, lui, s’est offert un de ses derniers petits déjeuners avec des œufs et du jambon vendéen. Le mot de la fin pour Antoine Cornic (Hubac Immobilier) qui a un temps été accompagné par des dauphins. Invité du Vendée Live, il en parle avec le regard d’un homme heureux : « c’était magique. C’est ce genre de moments qui nous remplissent de joie ».
Voir en ligne : Cartographie