Communiqué de presse, dimanche 21 août 2005, 16h00

Laurent Pellecuer gagne en Irlande et prend le pouvoir

Au terme d’une étape d’anthologie en remontant au vent dans une mer mauvaise, Laurent Pellecuer (Cliptol Sport) a remporté ce dimanche matin à Cork (Crosshaven) la troisième et avant-dernière manche de La Solitaire Afflelou Le Figaro. Ce Montpelliérain de 31 ans a devancé sur la ligne Yann Eliès (Groupe Generali Assurances) et Kito de Pavant (Groupe Bel). Et il fait coup double : pour 9 minutes et 39 secondes, Pellecuer passe en tête du général devant l’Italien Pietro D’Ali (Nanni Diesel). Mais les écarts sont faibles et tout se jouera sur la dernière étape vers Port Bourgenay...

Sous spi et sous la pluie irlandaise, Laurent Pellecuer « au comble de la joie » (lire l’interview du vainqueur) a remporté ce dimanche matin la troisième étape de La Solitaire Afflelou Le Figaro 2005, coiffant sur le poteau Yann Eliès (Groupe Generali Assurances) et Kito de Pavant (Groupe Bel). Le navigateur de Cliptol Sport a coupé la ligne d’arrivée à Crosshaven à 9h14’47. Il a parcouru les 456 milles du parcours théorique entre La Rochelle et Cork en 3 jours 15 heures 57 minutes et 47 secondes. Soit une faible vitesse Vitesse #speedsailing moyenne de 5,2 nœuds, révélatrice de la dureté de l’étape qui s’est presque entièrement courue en remontant au près dans une mer hachée, avec « le bateau qui tapait si fort dans la vague que j’avais peur qu’il se coupe en deux ». Seules la quatrième, dernière nuit de mer, et l’arrivée ont été un peu plus paisibles, les navigateurs finissant même au vent portant. En neuf participations à l’épreuve, c’est la première victoire d’étape de Laurent Pellecuer dans la mythique Solitaire. Dixième au classement général, avec 33 minutes et 13 secondes de retard sur l’Italien Pietro D’Ali (Nanni Diesel) avant cette étape irlandaise, ce Montpelliérain de 31 ans fait coup double : il prend aussi la tête des 43 navigateurs restant en course, avec 9 minutes et 39 secondes d’avance sur Pietro D’Ali (qui a fini l’étape 9^e à 42 minutes) et 10’32 sur Jérémie Beyou (Delta Dore), longtemps en tête de l’étape, mais qui n’a pu faire mieux que 5^e à 26 minutes et 20 secondes. Le podium de l’étape avant jury est complété par Yann Elies, qui a coupé la ligne d’arrivée 16 minutes et 6 secondes après Laurent Pellecuer et Kito de Pavant (à 21’45’’). Des écarts très faibles au terme de plus de 87 heures de course puisque les cinq premiers bateaux se tiennent en 26 minutes. On a ainsi eu droit à un superbe duel pour la 5^e place, Erwan Tabarly (Thales) coupant la ligne avec... une seconde d’avance seulement sur Jérémie Beyou ! Michel Desjoyeaux (Géant) a terminé 8^e à 39 minutes, devancé par Charles Caudrelier (Bostik, 7^e) et Fred Duthil (Brossard, 6^e). Les douze premiers de l’étape se tiennent en moins de 50 minutes...

Tout se jouera à la dernière étape

Les favoris sont là, mais il y a de grands perdants aussi, comme en témoigne l’arrivée d’Armel Le Cléac’h (Foncia-TBS) avec près de 4 heures de retard. Son option très ouest n’a pas fonctionné. Celle, trop au nord-est cette fois, de Gildas Morvan non plus : le skipper de Cercle Vert a perdu près d’1h30 et au général avant jury il recule de la deuxième à la 11^e place, à 57 minutes de Laurent Pellecuer. Thierry Chabagny, 5^e avant cette étape, a fini à plus de 2h et recule en 13^e position au général, à 1h49. .. Mauvaise opération aussi pour Eric Drouglazet (Crédit Maritime, 19^e) qui accuse désormais 2h20 de retard. Comme au cours de cette étape où chaque option un peu extrême s’est payée cash, La Solitaire se jouera aussi par élimination, en tous cas partiellement. D’autant que les organismes lessivés par ces trois jours et quatre nuits de mer n’ont que quelques heures pour se remettre : la quatrième et dernière étape vers Port-Bourgenay, la plus longue de l’épreuve avec ses 496 milles (918 km), doit s’élancer mardi à 11 heures. « Nous n’aurons jamais récupéré d’ici là », lance Kito de Pavant, les traits tirés, « il faudra faire avec et tout donner... » Il faudra surtout faire avec un classement général extrêmement resserré dans sa partie supérieure : au terme de cette « étape de légende », comme dit Jérémie Beyou (Delta Dore), ça se bouscule au portillon du podium : les trois premiers tiennent en dix minutes, les sept premiers en moins de 30 minutes et les onze premiers en moins d’une heure ! En plus de Laurent Pellecuer, Pietro D’Ali, Jérémie Beyou, et Fred Duthil (Brossard, 4^e à 12’51) au moins six autres bateaux demeurent extrêmement dangereux, à commencer par Erwan Tabarly, 4^e à l’étape et qui se hisse en 5^e position au général à 22’53. Kito de Pavant (à 24’46), Charles Caudrelier à 26’34, Michel Desjoyeaux à 34’29 sont toujours dans le match et même un Gildas Morvan à 57 minutes, un Romain Attanasio (MrBookmaker.com) à 51’54 ou encore un Yann Eliès, 10^e à 53’26 peuvent encore y croire. « Bien sûr que j’y crois encore à 100% ! » s’exclame Yann Eliès, « tant que la ligne de la dernière étape n’est pas franchie, il y a une lueur d’espoir et comme beaucoup je peux encore gagner ». Laurent Pellecuer est prévenu. Il n’y aura toujours pas de cadeaux dans l’ultime round de cette Solitaire Afflelou Le Figaro qui s’annonce aussi passionnante à suivre que rude pour les nerfs. Bruno Ménard.

L’Interview du vainqueur : « j’ai fait l’intérieur du virage »

Laurent Pellecuer, qu’est ce que ça représente de gagner cette étape ? « Je suis au comble de la joie ! J’ai fait le petit côté, l’intérieur du virage dans la dorsale, un peu comme avait fait Frédéric Duthil sur la deuxième étape en remontant de Getxo-Bilbao et ça a payé, ça a super bien marché. Je suis allé chercher cette victoire dans l’opportunité... et j’ai eu un peu de baraka aussi. » Qu’est-ce que tu retiendras de cette étape ? « Je crois que c’est une des étapes les plus dures jamais faites sur La Solitaire, on en a pris plein la tête ! Je me souviendrais longtemps de ces douze changements de voile d’avant dans le gros temps, avec le bateau qui tape dans la mer hachée. C’est toujours une manœuvre périlleuse, toujours 20 minutes de boulot avec le risque que la voile, voire le bonhomme passe à l’eau. Je crois que j’ai bien géré ma lucidité, il m’en restait pour le final décisif... » Tu prends aussi la tête au classement général... « C’est incroyable... Le boulot accompli au Centre d’Entraînement de La Grande-Motte m’a sans doute fait gagner en compétitivité et en sérénité. Je ne suis pas sûr que je vais me mettre une grosse pression supplémentaire, mais c’est certain que je ne suis pas prêt de lâcher le morceau ! Il ne reste plus qu’une étape à faire en donnant le maximum.. »

 Kito de Pavant : « On avait fait du bon boulot avec Jérémie, c’est un peu dommage de voir les écarts créés se réduire ainsi à l’arrivée. C’est un peu dommage, mais on a disputé une belle régate. Tout est à refaire pour la dernière, cela promet un final palpitant. C’est vrai qu’entre Laurent (Pellecuer), Pietro (D’Ali) et moi, on voit que le Centre d’Entraînement Méditerranéen fonctionne bien. Il a de belles réussites, il se défend et j’en suis très fier ! »

 Gildas Morvan : « Après un bon départ, j’ai quitté le paquet de tête, je me suis décalé. J’ai fait une grosse bêtise et ensuite j’ai eu du mal à retrouver mes repères. J’ai mal entamé le près après Ouessant et puis en une nuit, j’ai perdu 9 milles. C’était très dur de revenir. C’est une grosse déception, et c’est vrai, c’est un peu dur à avaler. Mais maintenant, l’affaire est faite, il faut oublier pour partir d’aplomb pour la prochaine étape. S’il y a du jeu Jeu #jeu , ce sera bon pour moi. Quoi qu’il en soit, il faudra se battre jusqu’au bout. La Solitaire ne fait pas de cadeau. Sur les deux premières étapes, j’ai créé des écarts réduit et là je paye cash. Mais La Solitaire, c’est comme ça, c’est toujours « je t’aime moi non plus... et sur cette étape, ce n’était pas l’amour ! »

 Jérémie Beyou (Delta Dore) : « Cela a été une étape digne de la légende de La Solitaire. Disons, une étape montagneuse. Je ne pensais pas que cela finirait comme ça. Oui, je suis déçu forcément parce que j’ai mené sur dernière 24 heures 24 heures Record de distance parcourue sur 24 heures . Mais je dispute La Solitaire depuis assez longtemps pour savoir que cela finit souvent comme ça. Ce qui est satisfaisant, c’est que je suis parti bien classé à mi-course et là je suis mieux classé encore. Mardi, pour la quatrième étape, c’est sûr, on partira pour la gagne ! »

 Pietro D’Ali (Nanni Diesel) : « Je suis content de tenir le rythme et au même niveau de vitesse Vitesse #speedsailing que mes concurrents. Et je suis plutôt content aussi d’être passé deuxième au classement général. Je laisse volontiers les soucis de la pression au premier. Je préfère cette situation : aller chercher la victoire plutôt que de courir pour garder une première place. »

 Armel Le Cléac’h : « J’ai attaqué. J’assume mes choix même si je ne pensais pas que cette option météo un peu extrême pouvait me coûter autant ». Parti, lors de l’avant-dernière nuit de mer, à l’ouest de la route pour aller chercher une bascule du vent, Armel a vite compris que cela ne passerait pas. « Je n’avais plus rien à la VHF, plus de classement, aucune infos. Mais en voyant le vent qui tournait dans le mauvais sens, je n’avais besoin d’aucune explication. Je savais que cela se passait mal pour moi et Oliver (Oliver Krauss, un autre concurrent NDLR). Ils nous étaient impossible de nous recaler sans perdre d’avantage ».

 Sam Davies : « Malgré les 100 milles de plus que sur les précédentes étapes, je n’ai pas trouvé celle-ci plus fatigante que d’habitude ! J’aime le vent, j’aime le près. J’étais contente d’être en mer dans ces conditions. J’aurais voulu que ça ne s’arrête pas aujourd’hui ! La nuit dernière était géniale ; c’était une nuit de réglages pour rester au contact de la tête de la flotte, pour rester devant... Je suis heureuse de la course que j’ai faite. J’estime avoir fait les bons choix tactiques au bon moment sauf hier peut-être. Je me trouvais à côté d’Erwan Tabarly qui a viré et je ne l’ai pas suivi ! Je pense que j’aurais dû ! A part ça ; je ne pense pas que j’aurais pu faire mieux. Avoir des personnes comme Laurent Pellecuer ou Pietro d’Ali devant, c’est super et très encourageant ! Dans la Solitaire Afflelou Le Figaro, tout le monde a ses chances ! Tous les espoirs sont permis. C’est plutôt très bien. »

 Benoit Petit : "Ce n’est pas le genre d’étape que j’affectionne le plus. Le bateau est giflé en permanence, il tape sur les vagues et on reçoit des sceaux d’eau dans la figure. J’ai un problème de vitesse avec le bateau dès que la mer commence à creuser. Forcément je suis déçu. Je manquais de vitesse, je me faisais décrocher par le paquet de tête alors que j’étais avec Yann Eliès et Jérémie Beyou. C’est rageant. Alors je me suis concentré sur ce que j’avais à faire."