Vendée Globe
Karen Leibovici boucle le Vendée Globe 2004-2005
Treizième aux Sables d’Olonne, la jeune femme est la dernière classée
dimanche 13 mars 2005 –
,Après la Mini-Transat et The Transat, Karen Leibovici a réalisé son rêve en terminant le Vendée Globe 2004-2005. Elle termine treizième et dernière mais concrétise un bel exploit à la barre du cigare rouge barré avant elle par Jean-Luc Van den Heede et Catherine Chabaud. Elle est la deuxième femme de ce tour du monde derrière Anne Liardet et la quatrième après Chabaud et MacArthur a terminer classée le Vendée Globe.
Karen Leibovici, un parcours entre courage et détermination !
– 5 mai 1972 : Naissance de Karen Leibovici à Rueil Malmaison (92)
– 1975 : Karen découvre les joies de la navigation à l’âge de 3 ans, en famille, avec ses parents et son frère Roch.
– 1987 : Karen a 15 ans et se prend d’une réelle passion pour la voile aux Glénan. Déjà déterminée, elle rêve de croiser un jour le Cap Horn.
...
– 2002 : Karen décide de participer au prochain Vendée Globe. Avant de trouver un partenaire pour cette aventure, elle y investit toutes ses économies
– 7 mai 2004 : Karen est au départ de The Transat sous les couleurs de l’un des ses fidèles partenaires, la Charente Maritime. Son choix se porte sur le célèbre Cigare Rouge, un bateau vieux de 13 ans qui n’a pas le potentiel pour gagner, mais dont elle sait qu’il lui permettra de faire ses armes. A bord elle se qualifie pour le Vendée Globe.
– 9 août 2004 : A La Rochelle, Karen est victime d’un grave accident de voiture en se rendant à sa séance de préparation physique quotidienne. Elle en ressort avec une fracture du sternum et une lésion à la dernière vertèbre (D12). Elle sort de l’hôpital quelques jours plus tard et si elle prend le départ du tour du monde, ce sera avec des plaques et des vis dans le dos.
– 19 août 2004 : Karen est de retour au chantier et reprend la préparation du Cigare Rouge
– 14 septembre 2004 : Le groupe GLON, décide de suivre Karen dans son aventure. La navigatrice portera les couleurs de BENEFIC®, l’oeuf nutrition. Elle a enfin la certitude de pouvoir être au départ de son premier Vendée Globe.
– 6 novembre 2004 : Sur les pontons des Sables d’Olonne, Jean-Luc Van den Heede, premier skipper du bateau, porte BENEFIC® sur les fonds baptismaux. Les anciens skippers du monocoque, Catherine Chabaud et Joé Seeten, sont présents aux côtés de Karen pour saluer ce grand moment.
-7 novembre 2004 : 13h02 : Le grand départ ! Karen Leibovici et BENEFIC® s’élancent pour le Tour du Monde en Solitaire sans Escale et sans Assistance.
12 novembre 2004 : Le duo est au large de Madère. La tête de la flotte bataille au passage des îles Canaries
– 14 novembre 2004 : Début des galères mécaniques pour la navigatrice qui décèle une fuite de gasoil et constate une panne définitive et totalement imprévisible de la pompe qui alimente le moteur. Karen, suivant les conseils de son équipe technique, se met très vite au travail et à la fabrication d’un système pour pallier cette défection. Après une délicate opération, le moteur se retrouve désormais alimenté par gravité.
– 22 novembre 2004 : Karen et BENEFIC® coupent la ligne symbolique de l’Equateur et plongent dans le sud.
– 3 décembre 2004 : Le moteur de BENEFIC® cause de nouveaux soucis à Karen Leibovici. Au près dans 45 noeuds de vent, le jerrican qui sert à alimenter le moteur ne peut être suffisamment rempli et des bulles d’air viennent désamorcer le système. Dans des conditions de navigation à la limite de la survie, la jeune femme commence à évoquer ouvertement cette douleur au dos qui ne la quitte plus et qui découle directement de son accident de voiture. C’est le début d’une longue souffrance.
– 10 décembre 2004 : Un des lazy jacks (ndlr : système de retenue de la grand voile) est coincé dans un chariot de rail de grand voile. Résultat, impossible d’envoyer toute la toile, mais plus encore de la réduire si le vent monte. Après 4 heures de travail dont quelques unes dans le mât, Karen remporte une nouvelle victoire sur le sort !
– 17 décembre 2004 : Karen et BENEFIC® passent les îles Kerguelen. La jeune femme se plaint de plus en plus de douleurs au niveau du dos. Ballottée dans tous les sens elle tente comme elle peut d’amortir les chocs.
– 27 décembre 2004 : Noël amer et absence de plaisir pour Karen. Nouveau problème technique, au-delà de 12 noeuds, l’arbre d’hélice se met à tourner et comme la navigatrice n’a plus d’inverseur, le moteur démarre tout seul. Il faut rajouter à cela un support de pilote qui s’arrache petit à petit. L’inquiétude règne dans l’entourage de Karen.
Lors d’un choc à l’occasion d’une ascension dans le mât, la jeune femme a heurté l’espar. La douleur incessante malgré les calmants et des difficultés à respirer laissent à penser qu’elle s’est cassée une côte. « C’est extrêmement difficile mais de toutes façons j’ai choisi d’y aller et je finirai quel qu’en soit le prix... », lâche-t-elle à son équipe qui s’inquiète de son état de santé.
– 3 janvier 2005 : Jean Le Cam, leader de la flotte, vient de passer le Cap Horn alors que Karen et BENEFIC® sortent de l’océan Indien et naviguent en mer de Tasmanie.
– 6 janvier 2005 : Désormais dans le Pacifique, Karen connaît un souci d’un genre nouveau. Si elle ne fait pas attention, elle pourrait manquer de gasoil avant la fin de son périple. Des mesures drastiques sont alors prises à bord de BENEFIC® : économie de batterie et limitation de communications par téléphone satellite, pas facile pour celle qui souffre de la solitude.
– 10 janvier 2005 : Il faut trouver un palliatif pour recharger les batteries du bord, Karen décide alors de commencer à utiliser son hydro générateur (hélice immergée à l’arrière du bateau le long d’un câble).
– 12 janvier 2005 : Passage à l’ouest pour Karen et BENEFIC® qui coupent l’ante méridien.
– 20 janvier 2005 : Nouvelles inquiétudes pour l’entourage de la navigatrice. Elle risque de finir le périple sans gasoil. Les réserves diminuent ce qui risque d’occasionner l’impossibilité de se servir des batteries et donc du pilote. Autre souci à bord, Karen découvre de grosses infiltrations d’ eau à l’avant du bateau. Elle doit écoper très souvent et sollicite ainsi un dos déjà meurtri.
– 27 janvier 2005 : Record battu ! Karen et BENEFIC® atteignent les 27 noeuds dans un de ces surfs des mers du Sud.
– 30 janvier 2005 : Le Cap Horn pour Karen. Pour la première fois de sa vie, la navigatrice s’offre le célèbre rocher sous un ciel dégagé et profite d’un spectacle à la hauteur de ses attentes.
– 2 février 2005 : Vincent Riou (PRB) coupe la ligne d’arrivée en grand vainqueur du Vendée Globe. Jean-Luc Van den Heede, Catherine Chabaud et Joé Seeten n’oublient pas Karen et la félicitent pour son premier Horn.
– 4 février 2005 : Karen est dans la pétole. Le déssalinisateur est tombé en panne, il faut le réparer. Une nouvelle restriction s’annonce pour la jeune femme, celle de l’eau douce.
– 17 février 2005 : 70 noeuds de vent dans l’axe, perte de l’hydro générateur, de moins en moins de gasoil, Karen sort de l’enfer et a craint pour sa sécurité pendant de longues heures. Les conditions de mer sont si inconfortables à bord d’un bateau aussi étroit que l’est BENEFIC®, que la navigatrice souffre le martyre et peine à passer outre les douleurs que lui infligent son dos.
– 20 février 2005 : Retour en Atlantique nord pour Karen qui vient de passer l’Equateur. Plus de déssalinisateur et l’épuisement inévitable des réserves d’eau potable, elle guette le moindre grain à la recherche d’une denrée désormais précieuse, l’eau de pluie.
– 21 février 2004 : La délivrance, elle récupère 40 litres d’eau et siphonne dans le dernier réservoir une quinzaine de litres.
– 3 mars 2005 : Faisant toujours preuve d’une grande combativité et d’un réel sens pratique, Karen réussi à réparer son hydro générateur, retrouvant ainsi une source d’énergie qui vient compléter les panneaux solaires, la réserve de gasoil étant quasi épuisée.
– 6 mars 2005 : A une semaine de l’arrivée aux Sables d’Olonne et de la fin de son tour du monde en solitaire, le pilote de BENEFIC® rend l’âme. C’est au pilote de secours, nettement moins performant, que Karen confie la marche du bateau quand l’épuisement et la douleur l’empêchent de barrer.
– 7 mars 2005 : Après une journée et une nuit de casse-tête, Karen remporte une victoire de plus sur la technique et parvient à réparer son pilote. C’est le soulagement tant pour la jeune femme que pour le Team BENEFIC® !
– 9 mars 2005 : 122 jours de course et plus que 634 milles avant Les Sables d’Olonne, la fin est proche et il est temps ! Lors de son dernier check-up, Karen constate qu’elle n’a plus que 5 litres de gasoil. La sentence tombe, elle va devoir terminer sans énergie, puisque qu’elle ne peut pas utiliser l’hydrogénérateur dans les conditions de mer rencontrées et qu’il n’y a pas le moindre rayon de soleil pour alimenter les panneaux solaires. Décidemment, rien ne lui est épargné dans ce Vendée Globe. Elle en terminera en allant chercher au plus profond d’elle-même, au bout de cette douleur qui elle ne connaît aucune accalmie.
– 13 mars 2005 : C’est à 20 heures 04 minutes et 20 secondes TU soit à 21 heures 04 minutes et 20 secondes heures françaises que le monocoque 60 pieds Benefic skippé par Karen Leibovici coupe la ligne d’arrivée du Vendée Globe. Son temps de course pour parcourir les 23 680 milles est de 126 jours 08 heures 02 minutes et 20 secondes à la vitesse moyenne théorique sur le parcours de 07,81nœuds (14,46 km/h). Karen Leibovici termine ainsi à la treizième place avec 38 jours 21 heures 14 minutes et 25 secondes de retard sur le vainqueur, Vincent Riou à bord de PRB.
Info Marie Le Berrigaud
Revenant sur son épopée à l’occasion d’une conférence de presse de lundi, à midi, Karen racontait aux Sablais et au public présent, les temps forts de ce qu’elle vient de vivre.
Retour sur cette conférence...
La journée de dimanche
– « J’ai vu le premier zodiac dans la matinée de dimanche. C’était un hollandais qui s‚est aventuré bien loin, puisque j’étais encore à 30 / 35 milles de côtes. Il est resté une bonne partie de la matinée a côté du bateau, sans trop parler, juste à regarder ».
– « Je pensais pouvoir aller me reposer quand le vent est tombé mais ça n’a pas duré longtemps car il y a vite eu plus de monde autour de moi ».
A propos des zodiacs presse qui venaient l’interroger : « Je n‚avais pas envie de leur répondre mais il faut bien le faire. Ce n’est pas facile de lâcher le bateau, la moindre inattention pouvait me faire perdre le peu de vitesse que j’avais, et toute ma concentration ».
– « Ca a été une transition très brutale, trop sans doute ».
La ligne d’arrivée et le chenal
– « J’ai vraiment attendu le « top » du comité pour lâcher le morceau, relâcher la pression, le stress etc. Ca a été une grande joie de voir mes proches monter à bord, c’est toujours beaucoup d’émotion de voir tous ces gens qui suivent et se passionnent pour ce que tu fais. C’est bon de voir que les gens s‚intéressent à d’autres choses que le football ! ».
– « Pedant le chenal, j’avoue avoir été complètement ailleurs, c’est difficile à exprimer, j’ai besoin de prendre du recul mais j’ai envie de dire merci ».
Le début de l’histoire
– « Ma course a commencé l’année dernière quand je suis allée à Dunkerque voir Joé Seeten. On a parlé de ce bateau (celui avec lequel elle vient de boucler le tour du monde). Joé m’a dit qu’il était à Caen, et que personne ne s’en occupait. C‚est devenue une idée fixe, il me fallait ce bateau. J’ai appelé le propriétaire et à partir de ce moment là, tout s’est enchaîné : rechercher des financements, remettre le bateau en état ... »
’« Pas facile quand le sponsor arrive tard de passer en mode « course ». Il faut laisser tomber le tournevis et répondre à d‚autres sollicitations, d’organisation, de média, de logistique etc etc ... Plus le départ approche, plus les journées sont courtes ».
Le départ
– « Beaucoup d’émotion de quitter le ponton. Le chenal au départ, c‚était un truc incroyable, tous ces gens ! ».
– « Après le coup de canon, cela a été un peu difficile avec tous ces bateaux autour de nous mais une fois la nuit tombée, quand tout le monde était parti, là ça devient bon, tu te dis que ça y est, c’est parti, j’ai réussi à prendre le départ, maintenant il faut aller au bout ».
Descente de l’Atlantique
– « Agréable, sympa même, ce sont des parcours que l’on connaît bien, on arrive vite dans des endroits où il fait beau et chaud ».
Océan Indien
– « L’Indien a été très difficile. On s’est pris une grosse tempête tout de suite en entrant ! Le bateau couché, dès le début ! D’un côté c’est bien parce que ça rassure tout de suite sur la fiabilité du bateau, mais bon, on se dit que si c’est tous les jours comme ça ... ». « L‚Indien c‚est terrible parce que tous les jours il fait mauvais, il y a beaucoup de vent, tout le temps, ça siffle tout le temps ».
Pacifique
– « Je suis entrée dans le Pacifique détendue, j’en avais ras le bol de l’Indien, j’étais contente d’arriver dans le Pacifique » « J’en ai pris plein les yeux ».
« Quel bonheur d‚aller vite, au dessus des 10 nds tout le temps, j’ai même fait une pointe à 27 nds !!, c’était grand ! ».
Cap Horn
– « J’ai eu beaucoup de chance. Je ne voulais pas passer le Cap Horn de nuit, je voulais en profiter au maximum. Je suis passée à 1,5 milles, je l’ai très bien vu, c‚était magnifique. C’est pour cela que je suis partie, pour aller voir le Cap Horn en solitaire. »
Le travail à faire avant de partir
– « Travailler sur la solitude. Le premier mois ça a été, le second un peu moins etc . » « Je suis quelqu’un qui a besoin d’échanger alors en fait le téléphone à bord ça fait mal, parce qu’on n’est jamais vraiment seul, donc jamais vraiment habitué. Sur la mini transat, le fait qu’il n’y ait pas de moyen de communication du tout, c’était plus facile parce que tu es obligé de te mettre dedans ».
Le bruit
– « C’est terrible, il y en a tout le temps. C‚est très stressant. Et encore, je n‚ai pas un bateau en carbone ! Tu finis par entendre un bruit de fond imaginaire, en plus du bruit réel. On apprend à reconnaître tous les bruits, on sait à l’oreille exactement à quelle vitesse on va, qu‚est ce qui va bien ou non à bord ».