En mer, 25 skippers vont vivre prochainement de tels instants. Pour les uns, ce sera pour demain lundi, pour d’autres, les jours peuvent encore se compter en semaine, ce qui sera le cas pour Etienne Svilarich (Grain de Soleil). Depuis l’abandon d’Eric Canivenc (Leasecom) suite à la rupture de son safran contre un objet non identifié, Etienne ferme la marche de cette édition. Il est encore à 1883 milles de la Guadeloupe.

Sur le podium installé au cœur de Point-à-Pitre, Michel Desjoyeaux (Géant) aura, sans le nommer, une pensée pour Etienne Svilarich. A la population, il demande de réserver un même accueil pour tous les concurrents qui vont finir un à un la course, comme c’est le cas lors des arrivées du Vendée Globe. « Je suis persuadé que le Rhum est plus dur en trimaran que le Vendée Globe que j’ai fait » lâchera par ailleurs Michel. Dans ses yeux, cela se lit comme dans un livre. Le combat a été intense, mais une nouvelle fois remarquablement mené. Quand Michel lance « je suis seul à décider », cela peut paraître une évidence, mais la réalité pourrait être tout autre. « Toute l’équipe a essayé de lui faire renoncer à son escale à Porto Santo » reconnaît Hubert Desjoyeaux, le grand frère - constructeur. Nous pensions que c’était une erreur ». Avec la victoire au bout du chemin, cette décision ne prête plus à discussion et sonne comme une évidence...

Ce type d’anecdotes, il y en a au moins une pour chaque jour de course. La maîtrise du sujet saute alors d’autant plus au yeux. On n’est pas par hasard vainqueur de la Route du Rhum Route du Rhum #RouteDuRhum , et le hasard, Michel l’élimine systématiquement, même s’il est le premier à reconnaître qu’il a construit sa victoire en profitant de tous les nombreux faits de course qui ont parsemé la route des multicoques. Dans les yeux de Marc Guillemot (Biscuits La Trinitaine-Ethypharm) se lit le même éclat, la même fierté d’avoir réussi cette traversée sur ces bateaux d’exceptions. « On se surprend à être plus fort qu’on ne l’est. Ce que je sais, c’est que j’adore la course en solitaire sur ces multicoques et le paradoxe, c’est que ce n’est pas raisonnable du tout ».

  Tout à leur duel à distance, Joé Seeten (Arcelor-Dunkerque) et Roland Jourdain (Sill) n’ont toujours pas répondu à la vacation. Demain lundi, dans leurs yeux, se lira le même éclat...

Nicolas Raynaud  

Classement scratch Basse-Terre- ligne d’arrivée

Depuis la première édition, cette course dans la course, initiée par la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Guadeloupe qui la dote d’un total de 20 000 euros, est très prisée des skippers. Voici le classement, forcément provisoire, après l’arrivée des quatre premiers. Car il s’agit ici de l’unique classement scratch de cette Route du Rhum Route du Rhum #RouteDuRhum 2002. La distance de ce parcours est de 25,4 milles.

 1 Géant en 2h 19’ 21’’
 2 La Trinitaine-Ethypharm en 2h 22’ 54’’
 3 Kingfisher en 4h 02’ 00’’
 4 Ecover en 4h16’24’’

Classement général Monocoques Imoca Imoca #IMOCA
 Place Skipper Bateau Temps de course Ecart au premier Moyenne sur l’orthodromie Nombre de milles parcourus Moyenne sur l’eau Trophée Basse Terre
 1 Ellen MacArthur Kingfisher 13j 13h 31’ 47’’ 10,91 nœuds 3 968 milles 12,19 nœuds 4h 02’ 00’’
 2 Mike Golding Ecover 13j 22h 49’ 35’’ 0j 09h 17’ 48’’ 10,61 nœuds 3 982 milles 11,89 nœuds 4h 16’ 24’’

Classement général Multicoques Orma
 1 Michel Desjoyeaux Géant 13j 07h 53’  11,10 nœuds
 2 Marc Guillemot La Trinitaine 13j 19h 36’ 18’’ 0j 11h 32’ 42’’ 10, 71 nœuds  

En direct du Rhum   Elie Canivenc (Leasecom) : « Et voilà, le dernier rebondissement dans mes aventures. Mon safran bâbord est cassé. Malheureusement je n’ai pas de moyen pour réparer l’axe, qui ne tient plus le safran en lui-même, en plus le compartiment arrière est noyé. Le problème c’est que le compartiment des pilotes se trouve là. Je tente de préserver la zone pour au moins garder un pilote en marche. Je fais route actuellement à 5 noeuds vers les Sables d’Olonne que je devrai toucher dans environ 64h. »  

 Didier Munduteguy (60ème Sud) : « C’est un réel plaisir de sentir qu’on approche de la ligne pour enfin boucler le Rhum. Par contre au niveau physique ça devient difficile. Je ne n’étais pas au mieux de ma forme en partant, du fait de mes activités professionnelles, bref ce sont des vacances usantes. »  

 Etienne Svilarich (Grain de Soleil) : « J’ai eu des petits soucis avec mon étambrai que j’ai du recaler. La ferrure de hâle-bas commence également à se faire la malle mais avec du bout j’ai réussi à fixer l’ensemble. Sinon je pense encore être dans les temps pour ma traversée. J’avais estimé à 25 jours mais je pense avoir une journée de retard sur mon tableau de marche. »  

 Franck Yves Escoffier (Crêpes Whaou !) : « Il ne me reste plus que 300 milles que je fais pour le moment au ralenti, sous trinquette et solent tangoné, à l’ancienne. Ca me permet de me reposer un peu avant d’attaquer la dernière partie de la course le long de la côte. Je pense pointer mon étrave en début de matinée lundi pour bénéficier du petit jour. »  

 Claude Thelier (Archipel Guadeloupe) : « J’ai vécu toutes les arrivées de la Route du rhum depuis 1978. Je me suis dis que le jour où j’irai à St Malo ce serait pour prendre le départ de la course. C’est maintenant chose faite. Je vis cette expérience comme elle vient. »  

 Régis Guillemot (Storage Tek) : « Je me suis endormi lamentablement 5 heures à la barre. Lorsque je me suis réveillé, le spi était autour de l’étai. Au départ de la course, on m’a appris que lorsqu’il t’arrivait une telle mésaventure, tu empannais et tout devait revenir dans l’ordre. Et bien ça marche pas mal. »  

 Clément Surtel (Laiterie St-Malo) : « La situation météo est vraiment difficile. Je suis descendu Sud pour éviter la molle de l’anticyclone et pour tenter de toucher un peu plus de vent. Je croise les doigts mais pour le moment ce n’est pas encore ça. »  

 Lalou Roucayrol (Banque Populaire) : « J’ai vraiment du mal à supporter la pétole. Un jour ça va, deux ça commence à faire, mais alors trois c’est l’enfer. A l’opposé, la vision que j’ai eu lorsque le vent était établi à 55 noeuds était magnifique. Avec ce vent qui souffle aussi fort, la mer s’aplatie et devient toute blanche. Mais cette fascination ne vient qu’après réflexion. »

 Mike Birch (Tir Groupé- Montres Yéma) : « Qui est derrière Lalou ? Où sont les autres multicoques ? Je ne pensais pas qu’il y aurait autant d’abandons. Je suis vraiment très heureux pour Ellen et Mike. Ils ont fait une superbe course. »     Hervé Cléris (Vaincre la Mucoviscidose)  « Passer sous la barre des mille milles est symbolique. La motivation est différente, l’arrivée commence à se faire sentir, bref l’excitation d’arriver est beaucoup plus pressante. Il est temps que je finisse car la fatigue devient pesante. »  

 Miranda Merron (UUDS) : « Je prends le risque de me dire que tout va bien à bord. Le gréement semble tenir le coup pour le moment. Je vais passer sous la barre des 1000 milles, tant mieux car j’aimerai bien arriver. »  

 Hervé Vachée (Mille Visages) : « J’ai eu deux soucis en deux jours. Le premier, c’est mon axe de transmission de pilote qui a cassé avant hier. J’ai eu le droit à un beau départ au lof sous genaker. Le temps que je remette le bateau en ordre, je me suis retrouvé à côté d’un cargo qui n’était pas en veille. Je suis passé à moins de 200 m de son tableau arrière. Cette nuit l’axe a de nouveau cassé. Je me suis aussi rendu compte que j’avais une voie d’eau au niveau de l’étrave. J’embarque environ 200 litres d’eau par jour. Le tout saupoudré d’une fuite de gazole avec une bonne odeur à l’intérieur et voici le tableau des deux derniers jours. »