Tour du monde en solitaire
Une SolOcéane plus "expédition" que "course" en 2009
Faute de concurrent, la course de Griboval se transformerait en parcours scientifique
jeudi 13 novembre 2008 –
Une brève sur le site internet du quotidien Ouest France lance une alarme : « La course SolOcéane tombe à l’eau ». « La SolOcéane ? » (avec le point d’interrogation) comme on répond au bout du numéro de téléphone du service de communication de la ville de Caen… est le tour du monde en solitaire en monotype imaginé et organisée par Yvan Griboval dont le départ doit être donné dans moins d’un an.
L’idée de l’organisateur du Trophée Clairefontaine des Champions, en catamarans monotypes, et de la Course des Falaises, en Figaro-Bénéteau monotypes, était de proposer course et bateaux clef en main pour une compétition au large qui pourrait servir de promotion aux skippers du circuit Figaro-Bénéteau en vue d’un projet plus important comme ceux des 60 pieds monocoque du Vendée Globe.
Le premier bateau a été lancé en 2007. Il est loué depuis un an par Charles Caudrelier, un ancien vainqueur du Figaro. Avec son sponsor Bostik, une filiale de Total, il n’a pu comme ses camarades Yann Elies ou Jérémie Beyou, monter un projet de monocoque Open. Il est vrai que les budgets ont gonflé. Un monocoque de 18,28 mètres coûte un minimum de 2,5 millions d’Euros à construire. Avec le budget de fonctionnement sur trois ans et des frais de recherches pour la conception d’un bateau neuf, cela monte la facture entre 5 et 10 millions d’euros. D’où l’idée d’un mini 60 pieds, moins cher et monotype pour que le meilleur, et pas forcément le plus riche, gagne… Et Caudrelier a été le premier à signer.
Le Veolia Ocean, du nom du sponsor de la course, a été conçu par le cabinet d’architectes qui a signé nombre de vainqueurs du Vendée Globe. Le groupe Finot a ainsi réalisé une belle bête de course de 53 pieds (16 mètres) équipée, comme les grands, de deux safrans, d’un mât-aile, de dérives et d’une quille pendulaire. Le tout est commercialisé par l’organisateur au prix de 1,5 million d’Euros. C’est beaucoup moins cher qu’un 60 pieds, mais aucun autre skipper n’a accroché au projet.
Plusieurs raisons à cela :
– Du côté des Français, l’idée d’acheter ou louer un bateau à l’organisateur du circuit et de la course semble poser problème.
– Avec ses 53 pieds, le Veolia Ocean a été conçu pour être une classe de bateaux à part et indépendante du milieu Open ou existait une classe de 50 pieds.
– La situation économique actuelle fait que même avec 1,5 million d’euros, le bateau est sans doute trop cher au vu du programme proposé et de ses retombées estimées (même si l’organisateur a tissé des partenariats médias).
– Du côté anglo-saxon, la voile au large en solitaire ne fonctionne pas. Le Veolia Ocean offre une marche d’entrée, mais les non-Français sont rares en Figaro et, quand ils sont les moyens, s’investissent directement sur le circuit IMOCA où ils sont nombreux cette année (7 Anglais sur le Vendée Globe).
– Un tour du monde de trop ? En dehors du Vendée Globe qui reste une référence, il y a la Velux Ocean (au départ de La Rochelle en 2010), la Barcelona World Race en double, la Portimao Global Ocean Race en 40 pieds… Cela fait beaucoup.
– Enfin, il y a une donnée nouvelle qui vient de la classe des multicoques de 50 pieds. Entre les deux supports, les sponsors tricolores semblent avoir choisi celle qui pousse en 2009 avec les nouveaux Crêpes Whaou !, Actual, Prince de Bretagne et Laiterie de St Malo. Ces prototypes destinés à la Route du Rhum en particulier ont la particularité de coûter le même prix à la construction tout en offrant un programme « classique » de transatlantiques.
Du coup, le journaliste de Ouest France annonce l’annulation pure et simple du départ de la course monotype : « Il n’y aura pas de course SolOcéane au départ de Caen en octobre 2009, avec retour programmé quatre mois plus tard à Cherbourg, après une escale d’un mois à Wellington (Nouvelle-Zélande). À la place de ce tour du monde en solitaire qui devait réunir 13 monocoques de 52 pieds (16 m), une expédition scientifique pourrait s’élancer avec deux ou trois bateaux. L’organisateur, SailingOne, invoque la crise financière pour justifier ce changement de bord. »
Interrogée à ce sujet, Clémentine Chaignaud du service communication de SailingOne ne nie pas ce changement de programme. « La SolOcéane aura bien lieu et partira bien de Caen. » On ne parle plus, par contre, de course mais « d’expédition scientifique ». Le programme initial qui consistait à se servir du voyage des bateaux autour du monde pour recueillir des informations scientifiques ([lire ici- http://www.soloceans.com/fr/oceanoscientific/]) est donc mis en avant. D’ailleurs le bateau de Charles Caudrelier attendu à Caen dans quelques jours doit « faire escale à Brest pour être vu par des scientifiques » et préparer l’expédition 2009. On en saura plus au Salon Nautique de Paris lors duquel SailingOne devrait donner de plus amples informations sur son programme à venir.
Ch.Guigueno