Les deux Franck du team Groupama : Cammas et Proffit

Photo : Y.Zedda

Le jour se lève à peine sur Salvador de Bahia. Il est 5h00 du matin (9h00 en France), lorsque l’ombre d’une grand-voile pénètre à pleine vitesse Vitesse #speedsailing dans la Baie de Tous les Saints. Après les forts grains de la nuit, le ciel fait place aux premiers rayons de soleil. Dix minutes plus tard, une volée de pétards salue l’arrivée du premier multicoque 60 pieds. Franck Cammas et son trimaran vert et blanc réalisent le doublé en remportant deux fois de suite la Transat Jacques Vabre Transat Jacques Vabre #TJV2015 . Pour Franck Proffit aussi c’est un doublé, après sa victoire en 99 aux côtés de Loïck Peyron. A 30 ans, Franck Cammas termine en apothéose une saison déjà exceptionnelle où il n’a laissé échappé qu’une seule victoire ( vainqueur de la Transat Jacques Vabre Transat Jacques Vabre #TJV2015 , du Challenge Mondial Assistance et de trois Grands Prix sur quatre).

« Sur la fin, la situation était un peu stressante, avoue Franck Cammas. On comptait les heures et les milles. Sans Belgacom, on aurait été plus tranquille les deux trois derniers jours. On sait très bien qu’avec leur vitesse Vitesse #speedsailing , ils nous auraient passé dans quelques heures. » « C’était un sprint effréné avec les Belges, ajoute Franck Proffit. On se calait sur leur vitesse pour les contrôler. On avait un petit matelas de milles d’avance. Donc, on a pu gérer. » Les yeux rougis par le sel, le visage tiré par la fatigue, les deux Franck savouraient leur victoire. « Physiquement, c’est comme si on sortait de boîte, enchaîne Franck Cammas. On n’a pas dormi de la nuit. Mais on est content d’arriver au petit matin à Bahia. Ce parcours était plus court mais plus dur que la dernière fois. On a eu beaucoup de situations météo différentes ; de la brise, du près, du portant, de la pétole. On a cassé un petit morceau de foil Foil #foil dans les premiers jours, mais on n’en a pas parlé car cela ne paraissait pas important. D’après Mick Kermarec, cela ferait perdre 20% à grande vitesse. »

Deuxième à 1 heure 12 minutes de Groupama, Jean-Luc Nélias et Loïck Peyron (Belgacom) sont revenus dans le sillage du duo Cammas-Proffit ces derniers jours. « Grâce au Pot-au-Noir et à un peu de réussite, on a pu revenir rapidement et accélérer pour garder notre deuxième place, mais pas pour rattraper le premier » avoue Jean-Luc Nélias. « Il faut être conscient que le premier, comme en Formule 1, ne va pas prendre de risque si il a une grosse avance, ajoute Loïck Peyron. Il gère sa course pour gagner. C’est pour ça qu’on a pu revenir. Entre le 4^e et le 8^e jour, on a commis une petite erreur d’appréciation sur la météo qui nous a fait perdre la tête. » « Nous avons navigué sans pression commerciale, reprend Jean-Luc. Comme vous le savez, Belgacom arrête le sponsoring Sponsoring #Sponsoring , et le bateau a même déjà été vendu, je l’ai appris en mer. C’était une régate pour nous, tant pis pour vous… ».

Dimanche, les arrivées se sont succédé toute la journée. Derrière Groupama et Belgacom, Sergio Tacchini, skippé par Karine Fauconnier et Damian Foxall, est monté sur la troisième marche du podium, suivi de Géant (Michel desjoyeaux et Hervé Jan). « C’est vraiment une belle aventure Aventure et une belle course au large, racontait Karine Fauconnier à son arrivée. Nous avons fait un beau voyage avec Damian (Foxall). Il y a eu de tout dans ce voyage avec des moments durs, de fatigue et de bonheur. Il y a eu tous les contrastes possibles comme d’être dans le Golfe de Gascogne avec 45 nœuds et ne pas voir à 10 mètres et puis se trouver dans les alizés avec un bateau qui vole au-dessus de l’eau à 28-30 nœuds. » Heureuse de sa troisième place, Karine rayonnait littéralement de bonheur à son arrivée.

Quatrièmes, Michel Desjoyeaux et Hervé Jan (Géant) sont arrivés à 16h27 (heure française). Lâché depuis quelques jours par Sergio Tacchini, l’équipage de Géant avouait ce midi : « Je crois qu’on peut le dire maintenant : cela fait deux jours que nous naviguons sans safran sous le vent, a déclaré Hervé Jan. Pour Thomas Coville et Jacques Vinvent (Sodebo), la course va ressembler à celle de Bonduelle. Cette nuit, le safran central a définitivement cassé. Le lendemain du départ, Thomas et Jacques avaient découvert une fissure de 50 cm qu’ils ont préféré taire pour des raisons tactiques.

Monocoques 60 pieds

Au large de Recife (Brésil), Virbac applique une stratégie simple qui consiste à maintenir ses poursuivants à 130 milles derrière. « On ne prend pas de risques inconsidérés, explique Nicolas Abiven (Virbac). Dès qu’ils reviennent un peu, on remet un peu de toile. On tire sur le bateau comme il faut. Ils doivent aller 25% plus vite que nous pour nous rattraper maintenant, alors pourquoi allumer ? » En tête depuis les Canaries, le plan Farr de Jean-Pierre Dick a brillé aux avant-postes pendant toute la course. Derrière, la lutte est acharnée entre Mike Golding et Brian Thompson (Ecover) d’un côté, et Roland Jourdain et Alex Thomson (Sill) de l’autre. Cinq milles seulement séparent les deux monocoques, soit 1% du trajet restant (600 milles). Privé de spinnakers, Ecover espère sûrement que le vent n’adonne pas. Au travers sous génois, le tout nouveau plan Owen/Clarke, résiste aux assauts du duo franco-britannique Jourdain-Thomson. Mais si le vent adonne, l’absence de spi serait très pénalisante pour Ecover. Questionné sur le match Angleterre/France, Roland Jourdain plaisantait : « Je comprends beaucoup moins l’anglais d’un coup ! Alex était au téléphone et me tenait au courant minute par minute. En fait, il n’y a qu’en voile qu’on est bon sous la pluie ! »

Virbac est attendu dans la nuit de lundi à mardi à Salvador de Bahia, suivi le lendemain matin par Ecover ou Sill. Dimanche soir, six monocoques naviguaient encore dans l’hémisphère nord.

Monocoques 50 pieds

StorageTek (Guillemot-Salnelle) fait de la résistance. Deuxième à 238 milles du premier, le petit 45 pieds contient les assauts répétés de Défi Vendéen (Durand-Chemin), toujours à 20 milles derrière. Ces trois monocoques ne sont pas attendus avant dimanche prochain.

Loïc Le Bras

• Arrivées Multicoques 60 pieds :

 1. Groupama (10 jours 23 heures 10 minutes et 41 secondes)
 2. Belgacom (11 jours 00 heures 22 minutes et 42 secondes)
 3. Sergio Tacchini (11 jours 03 heures 20 minutes et 28 secondes)