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Select 650

Bruno Simonnet : « Je l’ai fait, Yes ! Et podium pour les D2 ! »

Le skipper d’El Nono D2 revient sur cette 1re victoire en solo

lundi 3 mai 2010Christophe Guigueno

En 2008, Pierre Rolland, l’architecte du Dingo 2e génération avait remporté la course ‘Les Sables – Les Açores – Les Sables’ en proto. Le D2 n’était alors pas encore homologué et seulement 7 protos avaient terminé. Cette année, le mini de série du chantier Marée Haute truste les victoires. Après Sandrine Berthot et Yves Le Blévec, vainqueurs de la Demi Clé en double, c’est Bruno Simonnet, 48 ans, skipper d’ « El NoNo D2 744 », qui vient de remporter la Pornichet Select 650. Il nous raconte son parcours…

Bruno Somonnet :

« Voici le résumé et les temps forts de la Select 650 vu par El NoNo D2 744.

Samedi Matin 5h. Après une nuit de repos relatif avec Super Loulou qui nous réveille, Joëlle me souhaite bonne course et de la gagner. Tout en me rasant, je me rappelle cette phrase « gagne la course mon … », bon je mets ça sur le compte de la fatigue, franchement, gagner…

Au ponton. Étant en super forme, j’oublie tous les fruits et autres ingrédients. Sur le ponton visite à la dernière minute de la petite famille, je savoure simplement, je n’ai pas la pression de l’année dernière : ma première course en mini depuis 20 ans et une météo moins clémente. Je sais que je peux terminer, ça rassure. C’est donc détendu que je rejoins la ligne de départ. Ha : un petit coup de stress quand même. Aucun de mes 3 GPS ne fonctionne, ils ne se synchronisent pas. Puis tout rentre dans l’ordre. En route pour le départ !

Départ. Surtout ne pas prendre de risque. Départ plutôt du bon coté du plan d’eau que là où la ligne est favorable. Je choisis donc l’option vent. Je me retrouve avec mon copain d’entraînement Marée.de à plusieurs reprises (ndr : Jörg Riechers). Je le laisse passer. Lui il a comme objectif de gagner. Nonobstant, je passe premier des séries au Guérandaises. Et alors que les protos se marquent, j’en profite pour aller chercher du vent plus frais 1/2 mile au-dessus et, vu que ca marche, je persiste. Quelques protos s’en aperçoivent et se recalent avec moi. Je ferai quasi jeu Jeu #jeu égal au près jusqu’à la cardinale Goué vas du Four. Et là on passe au débridé et c’est la puissance des protos qui parle. Une rencontre sympathique avec le trimaran Actual qui remonte la flotte, vient à ma hauteur et conforte ma position.

Les Birvideaux. Je maintiens ma première place avec les protos d’anciennes générations jusqu’au Birvideaux et je vois que derrière certains me remontent. Je n’ai pas encore trouvé le réglage au reaching, c’est mieux mais je tâtonne encore. Aux Birvideaux, rencontre avec Tanguy et Sandrine venus nous accueillir au passage de la marque. Je n’ai plus que 1 mile d’avance sur Groupe Qualitel (697) et Bidoundé (757, un autre D2, comme quoi il a trouvé le mode d’emploi au reaching). Il fait nuit, je fais route sur Belle-Île, et là je ne comprends rien, j’avance à 3 nœuds, il me faudra plus de 2 heures pour finalement m’arrêter et faire une marche arrière. Je repars 4.5 nœuds, c’est mieux mais toujours pas ça. Je ne sais pas ce que j’ai pu accrocher. J’en profite pour dormir, surtout ne pas m’énerver, ne pas me mettre de pression. La nuit, je commence à voir des lumières qui m’entourent, ça revient de l’arrière.

Au petit matin, je vois Sandrine (autre D2), Samy (Nacira), François (Pogo 2). Là, je me dis que j’ai vraiment loupé quelque chose sur ma vitesse Vitesse #speedsailing . Et puis, vers 8 heures du matin ca y est, je retrouve une vitesse Vitesse #speedsailing cohérente et commence à doubler des concurrents. Je fais quand même une belle erreur, je persiste à les suivre au lieu de suivre mon plan de route.

Arrivée sur Yeu sous spi. Là encore des bateaux passent. Bon cette fois-ci je suis au contact et je me mets à régler le bateau, je reprends petit à petit des places et je reviens sur la tête de la course. Le manque de navigation et de repères sur les réglages sont évidents, c’est la première fois que j’utilise ce nouveau spi et je cherche son mode d’emploi.

Arrivée sur les Sables. Là encore je suis la flotte (réveille-toi !!!), ensuite j’empanne trop tard pour aller chercher du vent à la côte, et je perds encore des places car le refus espéré n’est pas là . Bilan : 16e au passage de la marque. Je me dégage de deux milles vers l’ouest et je vire. Là je sais que je suis en position favorable au dessus de la flotte et je vais faire de la vitesse, je remonte jusqu’à la 5e place en longeant la flotte et en pointant sur le groupe de tête. L’option à la côte est excellente, Biboundé (D2 757) contrôle la flotte devant. Je vois quelques bateaux qui commencent à renvoyer vers l’ouest alors je décide, pour garantir qu’un D2 soit toujours dans le coup, de contrôler le groupe qui va vers l’ouest en me positionnant entre Yeu et ce groupe.

Par contre qu’est-ce que je ramasse à Yeu ! Quelle option catastrophique ! La tête de la course m’a bien pris 3 miles. Je comprends qu’il va falloir encore être patient pour revenir. Nous sommes toujours au près et avec l’option génois, nous sommes intouchables en vitesse (dans moins de 10 nœuds de vent), c’est un plus indéniable. Je me cale un peu vers l’ouest, il est prévu une bascule NO demain, je préfère être au vent de la flotte pour un éventuel passage à l’ouest de Belle-Île car l’ETA n’est pas bonne pour passer dans les courants coté Est de Belle-Île. Et ce sera un peu plus dégagé pour dormir car, au près, il y a des risques de croisements et donc d’abordage. Bon, je suis assez calé vers l’ouest, je vais faire de la route directe.

Personne autour, je vais préparer mon virement (c’est-à-dire changer de côté toutes les affaires à bord soit environ 60 kg entre bidons et autres affaires embarquées), je rentre dans la cabine et là : CRASSHHHHHHHH … Je me dis ‘NON, pas possible, pas maintenant je dois finir cette course’ ! Je sors et je vois un bateau sans feu qui s’écarte de moi. Un beau refus de tribord ! Il m’a percuté à pleine vitesse au près. Je jette un coup d’œil : pas de trou dans la coque, ouf !!! Je préviens le sémaphore d’Yeu, le comité de course que le 312 (Proto) et moi-même continuons la course. J’en ai quand même un coup au moral.

Pour la suite, la nuit se passera bien entrecoupé de tranche de sommeil de 10 mn à 15 mn. Le vent faiblit jusqu’à pétole au petit matin (mer façon miroir), je suis plus décalé à l’Est que prévu car c’était le bord le plus rapprochant. Je vais garder en point de mire la possibilité de passer à l’Ouest ou à l’Est de Belle-Île. Pétole, oui, mais il est prévu deux évènements pour ce troisième jour de course : le vent doit basculer NO et le thermique est prévu. Je continue ma progression Nord autant que je peux en virant avec mon genaker, entre 0,5 et 1 nœuds en vitesse fond porté le plus souvent pas le courant. L’option Ouest devient de moins en moins possible et l’option « courant coté Est (Hoëdic, Houât, Teignouse) + thermique » passe au vert.

Les abandons s’annoncent, on s’amuse à voir les méduses qui nous dépassent, Rémy 492 (Mistral) a même un poisson qui s’accroche à l’un de ses safrans. Des risées apparaissent et je décolle avec le Pogo 2 n°552. Il prend une route qui s’écarte de Belle-Île et s’envole. Je reste sur l’intérieur de Belle-Île comme gros risque, si la bascule NO prend le dessus, d’avoir un trou de vent. Je traverse une partie de courant importante pour arriver dans une zone plus favorable et qui me poussera vers Belle-Île, m’aidant à faire de l’ouest vers la marque. Je ne peux pas rejoindre la flotte plus à l’Est qui longe Houat, trop loin et hors de route. Je compte toujours sur la bascule NO, et ‘Yes’, la bascule arrive. A ce moment-là, toute la flotte sous le vent se prend au moins 2 miles de recalage.

En tête à Groix. J’ai en ligne de mire le 552 (Guénolé). Nous sommes au près, Il échange avec Seb (716 Eole Génération), le premier proto qui descend de Groix. Nous comprenons que nous sommes en tête, mais le fait d’avoir deux D2 qui lui courent après, visiblement, le touche au moral. Et bien, j’en profite pour le déboîter sous le vent et me recaler, au passage. Au Nord de Groix, je passe avec 1/2 mile d’avance. Brendan (Biboundé) est bien remonté derrière, il va vite et devient pressant sur le 552. Le long de Groix, sous spi, le petit groupe se restaure en ce début de nuit, je suis un peu plus écarté car, là aussi, il est annoncé une bascule NE, et bien, en moins de 5 minutes, le vent monte à près de 14 nœuds avec la bascule. C’est chaud pour les cailloux à l’Est de Groix. Le 552 est obligé d’affaler et de faire de l’Est. Brendan passe sous genaker, je descends à 20° de la route sous spi, j’essaye de faire un premier trou. Je prépare ensuite mon genaker qui est plus petit que celui du 757 et là, je pars pour un long run entre 7 et 8 nœuds à 70° du vent par 10-12 nœuds de vent. Brendan passe sous génois, je creuse l’écart.

‘Teignouse ou pas Teignouse ?’ Cette option courant, je l’abandonne rapidement. Je pense que le 552 tente cette option car il s’annonce coté Quiberon. Je fonce sur les balises et cardinales côté Ouest des îles et maintient la vitesse jusqu’au Sud de Belle-Île. Derrière, je ne perçois plus les lumières du 757, je l’aperçois plus à l’Est que moi. Je suis inquiet et l’appelle pour savoir s’il tente une option courant entre les îles ou s’il s’est endormi. Plusieurs appels, pas de réponse… (Il m’avouera à l’arrivée qu’il s’est endormi et réveillé tout d’un coup dans le passage des Beniguets !!!) Il n’empêche que je maintiens mon option, je relis 10 fois la carte des courants, je ne comprends pas l’option prise par les deux poursuivants, et puis je n’ai pas le choix car, maintenant, je m’aperçois que flotte sous le vent le D2 (câble qui tient le mât entre les 2 barres de flèches). Est-ce la suite de l’impact d’hier ? J’espère faire route sur un bord et ne pas avoir à virer.

Le final. J’arrive en vue de la marque de parcours, et je scrute pour voir si les bateaux arrivent de leur option Est. Je vois une voile devant la cardinale de Goué Vas Sud. Les deux bateaux poursuivant les 757 et 552 s’annoncent au comité de course !!! (dans le règlement, c’est à 2 milles de l’arrivée qu’il faut le faire) alors je suis désorienté. Je ne comprends pas, je ne les ai pas vus passer. Il m’auraient pris 10 miles dans la nuit ? Alors que j’ai fait le forcing, je n’ai pas dormi une minute (je me bien reposé des nuits précédentes), j’ai attaqué, jamais en dessous de 6-7 nœuds… je ne comprends pas. Et ce bateau devant, cela veut dire que la flotte est revenue sur moi ? C’est un cauchemar, je n’y comprends rien. Je remonte à bloc sur le bateau qui est devant moi. Allez, en 10 miles, je peux encore reprendre des bateaux. Je suis content qu’il y ait encore un D2 en bataille pour le podium, mais j’aurais bien aimé que nous soyons à deux D2 sur ce podium.

Le retour contre le courant à devoir tirer des bords me fait mal aux tripes. Je préviens le comité de course que je peux à tout moment perdre le mât, mais je continue à être en course. Je passe enfin le bateau devant moi, le gars n’a pas l’air d’être frais, j’accélère, en fait c’est le proto Tchèque (759).

J’arrive en vue de la ligne, un zodiac vient à ma rencontre c’est Hervé Aubry qui pilote. Il me dit ‘bravo pour ta « perf »’ mais il ne donne pas ma place. Alors je prends cela comme un encouragement mais, au fond de moi, je suis déçu. J’aurais aimé offrir un podium à la petite Louise qui est née il y a un an, alors que Papa était en course sur la « Sélect 2009 ». Hervé me dit : ‘si, si tu es premier !’ Je ne le crois pas. Il repart au port. Je coupe la ligne à 9h30. Un autre bateau vient me chercher. Je demande : ‘il y a combien de séries arrivés ?’ Au moins 10 bateaux sont dans le port… Bon, alors je n’ai rien compris, qu’est ce qui a pu se passer ? Nous sommes en route en remorque vers le port et puis s’annoncent le 552 et le 757 à 2 miles de l’arrivée. Je ne comprends pas, ils s’étaient annoncés avant. Le 552 (Guénolé le Maux) demande, combien de bateaux de série sont arrivés, un long blanc, et le comité de course de répondre, ‘un le 744’ !!!!

Et là Yes !!!! Je l’ai fait, Yes !!!!! Et en plus ‘Podium pour les D2’. Un beau cadeau pour le premier anniversaire de Loulou à lui raconter plus tard. Les deux compères du podium sont à plus d’une heure et le quatrième arrive avec un beau peloton 4 heures plus tard. Belle course de pétole !

Au fait les 10 bateaux, c’était des abandons …

Je termine donc 1er Série, 8e au scratch derrière le 787 ‘Financière de l’Echiquier’.

Maintenant une autre course commence : le bateau n’est plus en état de naviguer. Le mois de mai va être une course-poursuite pour que Seldén me fournisse un nouveau mât, que les réparations de la coque soient faites. J’espère être au Trophée MAP… Et d’ici là, pas d’entraînements… »

Bruno El NoNo D2 744


Ndr SSS : Bruno cherche un sponsor pour sa saison et la Transat 650 en 2011. Pour tout renseignement, écrivez à la rédaction qui fera suivre. ;-)


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